J'allais acheter des fleurs au marché.
Le bouquet dans les mains, je me dirige vers la fleuriste.
Je lui parle très gentiment, lui demande s'il est possible d'imbiber les tiges pour le transport, "pour qu'elles restent belles jusqu'à chez-moi.."
Je souris. Et je souris encore plus grand quand elle me regarde avec des éclairs dans les yeux. Je pensais qu'elle allait me gifler.
Elle a des cheveux blancs hirsutes sur la tête, une voix forte et grave, la peau molle sous les bras qui s'agitent quand elle s'énerve. Elle s'emporte.
Je regrette d'avoir demandé. Elle me fait peur.
Elle m'explique, sans m'épargner, que les fleurs cultivées peuvent rester plus de quarante-huit heures sans eau.
Me raconte que celles qui viennent d'Hollande (j'ignorais qu'on faisait venir les fleurs de si loin??) sont pressées dans des sacs "comme ça!". Elle m'arrache le bouquet des mains, je fais le saut, elle l'écrase comme un boule de papier qu'on s'apprête à jeter. J'arrête de respirer, observant mes pauvres fleurs sans défense se faire maltraiter.
Mon coeur se froisse comme ces dernières: "Mon bouquet!!".
Elle le lâche, le replace. J'observe les dégâts, il ne semble pas trop abîmé. Ouf.
Elle me parle, en s'adoucissant: "Les gens pensent que les fleurs sont fragiles. C'est faux. Elles sont très résistantes, en fait." Savez-vous que la première chose qui survit après un volcan, une catastrophe naturelle, ce sont les fleurs? On croit devoir les épargner, les protéger. Elle naissent pourtant souvent à la suite de conditions extrêmes. De sévères sécheresses, d'un hiver rigoureux...
J'ai fait la métaphore avec l'humain et elle m'a souri de toutes ses dents jaunies.
Il faut affronter le vent, la tempête, la grêle. Le manque, et sa terre aride, pour que des fleurs y naissent. Ne pas s'épargner, mais au contraire, se risquer.
Mon bouquet a survécu.
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