dimanche 21 avril 2013

Mère

Ce sont deux minis fées qui m'ont ouvert le portail. Elles s'avancent et me tendent la joue poliment pour un  bisou de bonjour. On leur a bien montré comment on fait quand on a de la visite.
Elles retournent jouer, je monte dans la maison. La maman a un tablier, elle a fait des gâteaux. Elle s'approche, puis me dit: "Je ne t'embrasse pas, je ne me suis pas changée encore..." D'accord, mais l'odeur de gâteau ne me gêne pas du tout! Je l'aurais embrassée quand même, elle et ses petits bras potelés.
Elle me raconte un peu ses aventures depuis le matin. "Désolée, je n'ai pas eu le temps de me mettre un coup de brosse..." dit-elle en courant après la plus jeune avec un mouchoir pour lui enlever... ce que celle-ci veut garder dans son nez. Elle hurle. Maman la laisse aller, elle rit: "J'aurai ta peau de toute façon!".
Maman en a quatre, des minis fées comme celle-ci. "Je fais chauffer de l'eau pour le thé." Le téléphone sonne. Elle donne des conseils à une amie pour la première communion, tout en vaporisant la table avec du vinaigre et frottant. Elle me regarde, gesticule et fait des mimiques rigolotes pour me faire rire.
Quand elle s'assied enfin pour nous servir le gâteau, elle interrompt ses phrases pour ouvrir et re-ouvrir la fenêtre en sortant la tête dehors: " Attention dans l'escalier! Qu'est-ce que vous faites? Je ne le répéterai pas!" Encore et encore.

Je pense à ma soeur, à ma mère, à toutes ces mères. Leur coeur, leur patience.
Elle me raconte le soir où son mari a eu un petit infarctus, duquel il est rétabli maintenant. Elle allaitait sa troisième fille. Quand il est parti pour l'hôpital, qu'elle était morte d'inquiétude, ne savait pas si elle allait le revoir, elle a tout de suite pensé à son bébé: "Je devais absolument prendre sur moi, me contrôler, il ne fallait surtout pas que j'arrête de faire du lait." Wow. Cela vous remet bien sur le plancher des vaches.

Elle me dit qu'elle est très fatiguée, que c'est cette maison, les énergies, le courant d'eau qui passe dessous. Moi je pense: "Quatre enfants c'est une excellente raison aussi."
Je me vois soudain à sa place, avec son tablier, de la farine partout, une petite qui crie de la salle de bain pour qu'on essuie ses fesses.. Un "Maman j'ai fini de faire caca" me tire de mon cauchemar, heu, rêveries. Je lui confesse qu'elle a toute mon admiration, que j'aurais probablement déjà jeté mon tablier et toutes les assiettes à la fenêtre en criant "J'en ai maaaaarreeeee!" On rit, et en voyant la tête qu'elle fait, je devine qu'elle a déjà imaginé faire la même chose.

"Mais si. Tu verras. Ça viendra au bon moment." Je pense à mon père qui m'a toujours dit la même chose. Et je me dis que si c'est ma destinée, j'irai chasser dans les bois pour éviter de faire le repassage.
"Ne fais pas attention au ménage". Dans le couloir, une immense pile de vêtements à repasser menace de s'écrouler. Pour les temps libres.
Je ne sais pas si c'est cela, ou la couche de la petite dernière qui passe à mes côtés, mais j'ai soudain la nausée..


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