Je marchais sur le trottoir d'une rue passante, un peu avant 18h.
Une énorme voiture style 4x4 noire a ralenti sur le côté. C'était une Mercedez, ou quelque chose du genre. Je n'ai pas regardé quelle marque, j'ai plutôt fixé les yeux à l'intérieur.
Non, l'homme ne m'a pas proposé une ballade, il ne m'a offert ni bonbons ni de l'argent.
Il s'est seulement arrêté là pour.. mordre dans son Big Mac!
Je l'ai observé discrètement et j'ai souri en continuant ma route. Je me suis fait tout un film en le revoyant savourer son petit plaisir solitaire. Sa bouffée d'air dans une journée sans doute chargée. Je l'ai imaginé chercher le bon poste de radio pour un fond musical, fermer les yeux, adossé à son siège. En paix. Loin de tout.
Son médecin lui a interdit les BigMac, après ses dernières analyses. Trop de cholestérol dans les artères. Fini le McDo, et tout ce qui est bon. Le popcorn aussi, mais il a quand même triché dimanche au cinéma avec sa fille.
J'ai imaginé sa femme, qui l'attendait à la maison avec une assiette de riz aux légumes. Il dira qu'il n'a pas très faim, qu'il a eu une grosse journée, l'estomac un peu brassé. Il s'en sortira, elle sera un peu déçue mais pas grave. Il s'allongera devant une série, d'une histoire qu'il a du mal à suivre même si sa femme lui fait le résumé à chaque fois, et d'acteurs qu'il confond avec ceux de la pub de lait juste après.
Il s'endormira devant la télé encore ce soir, sa femme viendra lui replacer l'oreiller sous la tête. Il se lèvera à 6h demain matin, en se disant oups, en même temps que de se demander depuis combien de temps il n'a pas fait l'amour à sa femme.
Roulant à toute allure pour se rendre au meeting, il ira s'acheter une grosse brioche sucrée et cappuccino vanille pour emporter. Une douceur du matin.
En regardant cet homme seul, par la vitre de sa voiture, je me suis dit qu'on cherche les parenthèses. Pour arrêter le temps, quand on ne le voit pas nous dégarnir le front, ni arriver si vite avec le premier cheveu blanc... Il mangeait son BigMac comme il aurait aimé aller jouer au parc encore. Et se balancer haut. La vie qui le tire chaque jour par la main et l'éloigne des fous rire et de la liberté de toucher les nuages avec les pieds.
J'aurais voulu lui dire: je ne le dirai pas à ta femme, promis, tu peux manger tous les BigMac qui puissent te rendre heureux!
Seulement, je pense que la parenthèse qu'il cherche ne s'avale pas d'une bouchée.
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