vendredi 24 janvier 2014

Princesses


Dans sa chambre, elle avait un placard gigantesque. Et ce n'est pas seulement parce que mes souvenirs remontent à toute petite. Une garde-robe, où l'on entrait carrément pour jouer à la cachette. Des rangées et des rangées de vêtements, sur des cintres ou empilés; des chaussures, des ceintures, des foulards.. À faire envier toutes les femmes du monde, toutes princesses. C'était ma grand-mère.
Elle était très belle et toujours élégante. Aux anniversaires, mes amies d'école ne croyaient pas qu'elle était ma grand-mère. Elle ne faisait pas grand-mère du tout. Je me rappelle qu'elle mettait des bikinis sur le bord de sa piscine, qu'elle fumait la cigarette du bout des lèvres, qu'elle riait tout le temps, qu'elle aimait dire des gros mots, parfois. Elle buvait aussi sa bière avec du jus de tomate, portait du fard sur les paupières et revenait toujours chargée quand elle allait faire les courses. C'était elle, ma grand-mère. Originale et belle à la fois.

Mon grand-père l'aimait tellement, elle le faisait rire, lui apportait le soleil, je crois. Il l'appelait "ma Poudrée". Il était gentil, attentionné, gentleman avec elle. Si elle pouvait être princesse, c'est aussi grâce à lui. Parce qu'il ajustait et réajustait sa couronne.
Je lisais l'autre jour une lettre ouverte où Brad Pitt parlait de lui et Angelina Jolie, son couple, les moments plus difficiles. Il écrivait quelque chose de très beau: La femme est telle une fleur dont l'homme doit prendre soin, jour après jour.
Lorsque mon grand-père est décédé, trop jeune, ma grand-mère a commencé à flétrir. Elle avait perdu ce qui la rendait si belle.

C'est une leçon pour nous, femmes. Non pas que nous devons vivre sans homme. Au contraire; les aimer, leur dire, leur donner toute la place que l'on souhaite dans nos vies. Seulement s'assurer que l'on tienne soi-même sa couronne. Prendre le pouvoir de sa vie, de sa beauté. Amener l'homme dans son royaume, non pas attendre qu'il le construise pour nous. Pour cela, tant de femmes ont été fortes avant nous. Elles ont tracé le chemin que nous avons maintenant dans nos sociétés occidentales.

C'est aussi pour cette raison que j'ai décidé de poursuivre mes études. Pour utiliser toutes les ressources, l'or que l'on a posé à portée de mes mains. On ne réalise jamais assez la chance que l'on a, et les choix qui nous sont offerts.
J'ai envie de construire moi-même mon royaume. Pour toutes ces femmes qui ont perdu leur couronne.



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