mercredi 31 août 2016

Shrek

J’ai rencontré un Shrek. 
Shrek est un personnage fantaisiste, un ogre, aux proportions et aux pouvoirs surdimensionnés. Chez lui, tout est plus grand que nature. Et son cœur aussi.
Le Shrek que j’ai rencontré n’est pas vert, et il porte la moustache. Il fallait bien passer un peu incognito.. 

Je suis allée avec Shrek visiter des chutes, à quelques kilomètres de la ville où je suis au Rajasthan. Quand Shrek m’emmène, c’est sur sa moto. Qui est bien évidemment plus grosse et qui fait plus de bruit que toutes les autres.
Shrek et moi ne passons donc pas inaperçus dans ces petites rues étroites où défilent vaches, sangliers, marchands de légumes, de fritures, de lait.. Où circulent aussi des touctoucs remplis d’enfants revenant de l’école, et d’élégantes femmes en sari qui par un don incroyable arrivent à ne pas se salir malgré les immenses et nombreux crotins de vaches sur le chemin.
Un ami nous suivait aussi, au volant de sa -toute minuscule- motocyclette.
Le pavé était bien abîmé et sinueux, du aux nombreuses pluies en cette saison de moissons. J’étais à la fois un peu étourdie par les secousses, et comme droguée par cette sensation euphorisante de la route ; un mélange de liberté absolue, d’excitation, l’infinité de possibilités d’un horizon qui défile…

Quelques trente minutes plus tard, nous arrivions au magnifique endroit, nageant dans l’eau pure déferlant les montagnes, priant dans un temple tout en haut, et témoins ahuris d’un vol de noix de coco par un singe bien rusé aux fesses rouges.
Avant de repartir, notre ami s’aperçoit que les clés de sa moto louée se sont égarées pendant le chemin de l’allée. Une défectuosité de la serrure a fait que les clés sont tombées de l’appareil. 
Que faire ?! Shrek ne peut nous embarquer tous les deux, et on se demande si cela est bien sécuritaire de laisser la moto ici en laissant repartir notre ami en rickshaw.

Alors Shrek a une idée : « Je vais le pousser sur sa moto ». Comment ? « Avec mon pied. »
Parcourir une distance d’environ quarante kilomètres en poussant avec son pied une moto éteinte sur laquelle quelqu’un est assis, complètement à la merci de la route et de la circulation (et surtout; en Inde !!). Je me suis vivement opposée à cette idée, que je trouvais complètement folle et dangereuse. J’avais peur pour la sécurité de notre ami, et je trouvais cela déraisonnable.
Mais la force de Shrek ne se trouve pas seulement dans son physique ; elle est aussi mentale. Il n’a pas laissé place aux doutes ni aux arguments, et je ne sais comment je me suis finalement retrouvée derrière lui, acceptant l’aventure, souriant malgré moi de l’exploit incroyable qu’il était en train de réaliser.
On se regardait tous les trois en riant, cheveux dans le vent, partageant un moment fort et unique d’amitié. C’était à l’image de Shrek ; plus grand que nature. Notre ami expérimentait foi et confiance absolue- sa vie entière tenant entre les pieds de Shrek. J’avais pour ma part devant moi la preuve inouïe de ce que la force et la détermination peuvent accomplir. Et Shrek démontrait qu’il pouvait sans défaillir pousser quelqu’un jusqu’au bout du chemin. Face à la vie, une magnifique métaphore.


À croire à ses propres pouvoirs, on devient un géant.

1 commentaire:

Unknown a dit…

Merveilleux....